Synopsis court-métrage - Coupure

 

William Radet

Idée de court-métrage

Coupure

 

 

Un homme et une femme dans la même pièce.

 

Il parle sans cesse. Des paroles douces mais ininterrompues.

Ce qu’il dit est grave, intéressant, parfois terrible.

 

Parfois la femme voudrait dire quelque chose mais ne réussit pas à endiguer le flot.

La même scène au lit.

La même scène dans la voiture.

….

La femme prépare sa valise. Il la regarde, interrogateur.

 

--  Je pars. Tu ne fais que parler. Intarissable, insupportable.

--  Qui t’empêche de parler ? 

-- Je t’ai pas ta facilité. J’ai peur de te couper, de te faire mal…

-- Mais dimanche, à table, tu parlais !

-- Oui mais tu me coupais sans cesse ! Ça me faisait mal ! Je suis blessée de partout !

-- Je ne me rendais pas compte… je parle par amour… pour partager…

-- Oui mais les bouquins, laisse-moi les lire ! Ne me les raconte pas !

-- Je ne raconte pas… je dissèque… j’extirpe

-- Et bien je n’entends plus rien ! J’en ai marre ! Tu n’es plus qu’un bruit de fond !

-- Qu’est-ce que je dois faire pour que tu restes ?

-- Te taire… m’écouter, écouter les autres

-- Je ne fais que ça… Sinon je n’aurais rien à dire…

    Mais pour que tu restes près de moi, je te promets d’être silencieux.

 

Elle ne répond pas, septique mais défait sa valise.

L’homme sort. Il marche dans des rues calmes, presque désertes.

Il se met bientôt à parler seul. Sa voix est sourde et rauque.

Il dit des choses graves, des choses bizarres, des mots simples parfois terribles.

 

Sur son passage ses mots s’inscrivent sur le pavé, le goudron des trottoirs.

Tombés de sa bouche

Il ne s’en rend pas compte. Il marche.

Il rentre à la maison. Sa femme est absente. Il se sert un verre de vin rouge et attend.

 

Sa femme rentre. Elle est toute rose, toute jubilante !

-- Si tu savais… Dans la rue, les trottoirs sont tachés de pleins de mots...

   Des mots, des phrases formidables. Gênants, provocateurs.

   Certains tentent de les effacer. Ils frottent très fort... ils brossent…indélébile...

   D’autres tentent de casser le bitume... Les plus avancés jettent les pavés.

-- Par exemple…

 

Elle cite alors des phrases entières. Celles qu’il avait prononcées à la maison et qu’elle n’entendait plus

FIN

 

 


 

 

Cette idée de court-métrage s’inspire de ma nouvelle « Coupure » 

                                           

Coupure !

  

            Il la coupa une fois de plus... le sang allait couler...

Il ne lui coupait pourtant que la parole !

 

            Il s’étonnait toujours de cette extrême violence dans son regard, lorsque son sang ne faisait qu’un tour, rapide, rapide comme la montée de sa fureur.

Elle ne supportait plus qu’il tranche, qu’il sabre ses propos, sans plus se soucier des blessures qu’il provoquait.

 

            Lui, pourtant aurait tellement aimé l’entendre plus. Il aimait tellement la vigueur de ses idées, ses indignations, ses enthousiasmes... la finesse de ses indécisions... mais il ne paraissait pas l’écouter.

 

            Il parlait souvent, il parlait beaucoup. Elle restait là, sans presque rien dire. Il avait supposé qu’il s’agissait d’une personne réservée, pudique aussi, qui buvait la vie par les oreilles, gardant pour elle des secrets vraiment secrets. Il sentait qu’ils dialoguaient pourtant beaucoup au travers ses monologues. Il parlait plus qu’il ne le souhaitait, par crainte de rompre le fil...

 

            Aujourd’hui, il n’aimait sa voix que dans la solitude... Ailleurs, elle lui devenait étrangère, organisée, polie par les compromis.

            Sa  voix profonde serait l’écriture... mais l’écriture est une voix trop commune lorsqu’elle n’est que style... Il attendrait qu’elle soit un cri, un flot irrésistible, la lave d’un paroxysme!!!

 

            En attendant, il fallait, pour lui plaire, apprendre à se taire. Il se mit à parler, souvent, seul, dans les rues. Il eut bien de la peine à reconnaître les sons audibles de cette nouvelle voix, qui ne parlait qu’à lui. Elle était grave, rauque, sourde, lourde.

 

            Des mots bien trop lourds touchèrent un jour le sol.

Des mots bien trop acides qui touchent, qui tachent. Leur encre bleue nuit. Tous les trottoirs de la ville portaient l’empreinte de mots simples, mais terribles, qui faisaient baisser les yeux des plus rompus. Certains s’essayèrent à les effacer, à frotter très fort... indélébile... à casser le bitume... à jeter les pavés.

 

            Elle se mit à parcourir toutes les voies et les avenues, jubilant, enthousiaste devant ces phrases qui auraient pourtant bien dû lui rappeler quelque chose...

 

            Elle rentrait, heureuse, très. Elle lui racontait la rue, toute lue, toute nue, toute crue...

            Il souriait, elle riait, elle parlait, parlait... vibrait, vivait... Et lui pensa soudain qu’il n’arriverait jamais à mourir, bon sang !

 

Il éclata de rire en silence et faillit se couper la langue.

 

 

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