Synopsis court-métrage - Insecte
William Radet
Idée de court-métrage
Insecte
Une chambre peinte en noir… brillant.
Pas de meubles.
Un costume gris sur une chaise, une paire de lunettes noires.
Sur le lit un homme est nu sur la couverture grise.
Sur le dos. Raide. Droit.
Son corps se reflète dans le plafond de laque trop brillant. Un vrai miroir.
Alors apparaît sur sa jambe - ou plutôt sur son image au plafond - un insecte.
L’homme semble sur l’expectative. Il ne sait pas trop ce que c’est.
Une sorte de gros scarabée brun, soudain présent.
L’insecte reste longtemps immobile
Il démarre soudain, avance inexorablement. Trajectoire totalement rectiligne.
Rien ne le freine puisque trous et bosses ne sont que les reflets d’une anatomie...
Plus les reliefs s’accentuent, plus sa course semble maîtrisée.
Ses membres le propulsent avec une précision fantastique, comme si son but était programmé. Il court sur le sexe, le ventre, le nombril, le torse, toujours tout droit.
L’impression est curieuse pour l’homme qui l’observe, immobile, sur le dos, un genou plié, la bouche ouverte. Stop !
L’insecte mécanique s’arrête, exactement sur le reflet de la langue,
Comme s’il voulait entrer, comme s’il avait découvert une faille.
Pour l’homme, c’est insupportable. Il crache pour l’insecte de ses lèvres.
Il se lève d’un bond, saisit une pantoufle au pied du lit et assène à la bête un coup violent. Vers ses pattes arrière sa carrosserie brune s’est fendue, laissant échapper une sorte d’humeur jaunâtre. Il reste collé au plafond.
Dans les yeux de l’homme, la question. Est-il mort ?
… et l’homme reste longtemps encore dans l’attente, dans le désir de chute.
L’insecte ne bouge pas d’un iota. Longtemps
… et repart soudain, toujours en ligne droite, mais plus lentement, le corps en biais, laissant au passage une traînée visqueuse.
Exaspéré, L’homme bondit sur mon lit, fait chuter le monstre dans une feuille de journal, le précipite dans les toilettes et tire la chasse d’eau.
Mais la bête est légère... et la voici qui flotte encore, puisque les remous n’ont pas su l’emporter. L’insecte nage maintenant vers les bords de la cuvette.
L’homme en fureur asperge le naufragé increvable du flux acide d’un détergent bleu indigo. L’insecte exhale maintenant quelques bulles…
L’homme en costume gris et lunettes noire
écrit à la craie sur un mur gris « Les hommes doivent apprendre à tomber de haut ».
FIN
Cette idée de court-métrage s’inspire d’un passage
de mon roman « Un flou dangereux »
Il a dormi longtemps.
Il a repeint sa chambre en noir. Il a mis aussi un rideau sombre devant les étagères. La couverture est grise. Tout va bien. Il ne s’est même pas glissé dans les draps. Son corps se reflète dans le plafond de laque trop brillant. Un vrai miroir. Il est nu.
Alors apparaît sur sa jambe - ou plutôt sur son image au plafond - un insecte. Il est assez gros, il ne sait pas trop ce que c’est. Une sorte de scarabée brun, immobile, arrivé en douceur. L’homme pense à lui, solide, solitaire, silencieux... Il ne bouge pas. Il attend (quoique ce terme puisse être assez improbable pour lui). Il démarre soudain, avance crânement sur une trajectoire totalement rectiligne. Rien ne le freine, puisque les collines, trous et bosses ne sont que les reflets d’une anatomie... Plus les reliefs s’accentuent, plus sa course semble maîtrisée. Ses membres le propulsent avec une précision fantastique, comme si son but était programmé. Il court sur le sexe, le ventre, le nombril, le torse, toujours tout droit. L’impression est curieuse pour l’homme qui l’observe, immobile, sur le dos, un genou plié, la bouche ouverte. Stop !
L’insecte mécanique s’est arrêté, exactement sur le reflet de la langue, comme s’il voulait entrer, comme s’il avait découvert une faille. Son goût dans la bouche ! Un goût de pierre, de bois pourri, de mort. L’homme se lève d’un bond, saisit une pantoufle au pied du lit et lui assène un coup plutôt violent. Vers ses pattes arrière sa carrosserie brune s’est fendue, laissant échapper une sorte d’humeur jaunâtre. Il reste collé au plafond. Est-il mort ?
L’homme reste longtemps encore dans l’attente, dans le désir de chute. L’insecte ne bouge pas d’un iota, comme consterné, comme s’il procédait à des réflexions ou des calculs de probabilité sur un autre cataclysme. Dix, quinze minutes...
… et repart soudain, toujours en ligne droite, mais plus lentement, le corps en biais, laissant au passage une traînée visqueuse. L’homme ne sent pas la souffrance de cette petite masse sombre, solide, inatteignable. Exaspéré, il bondit sur mon lit, fait chuter le monstre dans une feuille de journal, le précipite dans les toilettes et tire la chasse d’eau. Mais la bête est légère... et la voici qui flotte encore, puisque les remous n’ont pas su l’emporter. L’insecte nage maintenant vers les bords de la cuvette.
C’en est trop, beaucoup trop ! L’homme asperge le naufragé increvable du flux acide d’un détergent bleu indigo. On ne saurait dire si l’animal est surpris, mais il exhale maintenant quelques bulles. L’homme songe à sa morve, à sa violence démesurée, à la mort d’un inconnu discret qui passait… simplement.
L’homme s’est senti plus faible que lui. Il a pensé longtemps à cette bestiole ; elle représentait le signe supplémentaire, la confirmation qu’il était grand temps qu’il s’endurcisse, qu’il apprenne à « tomber de haut » lui aussi.